Page:Chavannes - Cinq cents contes et apologues.djvu/13

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AVERTISSEMENT.

Dans les derniers jours de janvier 1918, avant de partir pour la maison de santé où il allait bientôt expirer, Édouard Chavannes, épuisé par la maladie et par les préoccupations de la guerre, avait tenu pourtant à mettre en ordre ses papiers. Par un prodige d’énergie, il rassembla et classa dans des liasses les travaux qu’il avait achevés et ceux qu’il avait laissés en suspens. Après sa mort, Mme Chavannes me demanda d’examiner ces paquets. Un d’entre eux, ficelé dans du papier gris d’emballage, portait en lettres microscopiques, tracées par une main défaillante, cette indication : « Lévi corrigera les bêtises ». Le ton familier de cette recommandation exprimait, et pour la dernière fois, l’étroite intimité où nous avions vécu pendant plus de trente années. Le paquet contenait les feuillets soigneusement paginés des notes sur les Cinq cents Contes et Apologues extraits du Tripiṭaka chinois qui avaient été publiés en trois volumes, sous les auspices de la Société Asiatique (Paris, Ernest Leroux, 1910-1911). La préparation de ces trois volumes avait longtemps rempli nos séances hebdomadaires de travail en commun ; nous en avions ensemble relu toutes les traductions, discuté les difficultés, examiné les problèmes. Chavannes, qui s’était à cette occasion initié aux recueils de folklore, s’était pris d’une passion véritablement sportive pour la recherche des contes apparentés aux siens ; ces recherches qui lui ouvraient un horizon toujours plus étendu et qui séduisaient par là son esprit porté aux idées générales, avaient fini par prendre le pas chez lui sur les