Page:Chavette - Les Petites Comédies du vice, 1890.djvu/120

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peut pas mieux dire à une femme qu’elle est folle. On voit que vos seize francs de places vous ont saigné le cœur, vous cherchez à me les faire cruellement payer. — Comme si c’était ma faute parce qu’un autre vous a fourré de pareilles places !

Monsieur. — On ne m’a rien fourré du tout ; j’ai moi-même choisi les numéros sur le plan qui se trouvait dans le bureau de location.

Madame. — Ainsi vous avez donné votre argent sans même demander à voir ces places pour vous assurer si les sièges étaient plus ou moins moelleux.

Monsieur. — Mais il n’est pas dans l’usage de demander à tâter les sièges.

Madame. — Pourquoi pas ? On tâte bien un poulet avant de l’acheter ; il devrait en être de même pour une place.

Monsieur. — Et puis, dans la journée, la plus profonde obscurité règne dans les salles.

Madame. — On exige une lanterne.

Monsieur. — Oh !

Madame. — Quoi ? oh ! — J’ai l’air de réclamer une montagne ; vous n’allez pas me faire croire que, dans une ville comme Paris, il ne soit pas possible de trouver une lanterne. — Mais, vous, le plus petit effort coûte trop à votre galanterie, et peu vous importe qu’une pauvre créature — dont la loi vous a confié le bonheur et la santé — attrape une courbature sur un siège plus dur que pierre.

Monsieur, avec empressement. — Veux-tu que je dise à l’ouvreuse de t’apporter un coussin ?

Madame, avec dégoût. — Pouah ! un coussin qui a servi à tout le monde ! n’est-ce pas ? — Pendant