Page:Chefs-d'oeuvre des auteurs comiques, Tome 5, 1846.djvu/197

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Je croyais célébrer le retour de ma fille.

À grands frais, je convoque amis, parents, famille ;

J'assemble un auditoire et nombreux et galant ; [235]

Et nous fermons. Cela n'est-il pas régalant ?

DAMIS, froidement.

Certes, les trois sujets étaient bons ; c'est dommage.

FRANCALEU

Quelle sérénité ! Savez-vous, quand j'enrage,

Que j'enrage encor plus, si l'on n'enrage aussi ?

DAMIS

C'est que je vois, Monsieur, bon remède à ceci. [240]

Le rôle des vieillards n'est pas de longue haleine ;

Les deux premiers venus le rempliront sans peine.

FRANCALEU

Et l'amant ?

DAMIS, présentant Dorante.

Mon ami s'en acquitte à ravir.

DORANTE, à Francaleu.

Vous me voyez, Monsieur, tout prêt à vous servir.

FRANCALEU, à Damis.

Il a d'un amoureux tout à fait l'encolure. [245]

DAMIS

Le jeu bien au-dessus encor de la figure.

FRANCALEU

Mais il s'agit ici d'un amant maltraité ;

Et peut-être monsieur ne l'a jamais été.

Or il faut, quelque loin qu'un talent puisse atteindre,

Éprouver pour sentir, et sentir pour bien feindre. [250]

DAMIS, avec un rire malin.

Aussi n'ira-t-il pas se chercher en autrui.

Le rôle qu'il accepte est modelé sur lui.

Le pauvre infortuné meurt pour une inhumaine,

Sans oser déclarer son amoureuse peine ;

De façon qu'il en est encore à s'aviser, [255]

Quand peut-être quelqu'autre est tout près d'épouser.

DORANTE, outré.

Ma situation sans doute est peu commune ;

Et je sens en effet toute mon infortune.

FRANCALEU

Bon ! Tant mieux ! Vous voilà selon notre désir.