Page:Chefs-d’œuvre de Lord Byron, trad. A. Regnault, tome II, 1874.djvu/81

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Ton supplice ajourné, ta grâce passagère,
Servent à préparer mille tourments nouveaux
Et de mon désespoir enveniment les maux.
Il menace mes jours ; mais sa folle tendresse,
Impérieuse encor, destine à son plaisir
Son esclave ; et le maître, un jour sortant d’ivresse,
Blasé, rassasié d’attraits qu’il sut flétrir…
Je vois le sac béant, et là bâille l’abîme !
Suis-je donc le jouet d’un vieillard amoureux ?
L’instrument usé, vil, nul, ignoble victime ?
Je te vis, je t’aimai, mon sauveur, et je veux
Te sauver à mon tour. Fût-ce au moins pour apprendre
Si le cœur d’une esclave est sûr, sensible et tendre.
S’il n’eût pas menacé ma vie et mon honneur
(Car il tient les serments prononcés dans la rage),
De te sauver encor j’aurais eu le bonheur,
En épargnant Seyd avide de carnage.
Maintenant toute à toi, prête aux événements.
Toi, tu ne m’aimes point, tu me connais à peine,
Si tu ne me hais pas… Mes premiers sentiments,
C’est toi qui les fis naître, amour ainsi que haine.
Ose donc éprouver un cœur oriental
Et ne crains plus le feu qui brûle un cœur de femme.
Ah ! du salut pour toi vois luire le signal,
D’une barque mainote apparaître la flamme.
Mais là, dans une chambre où nous portons nos pas,
Dort le tyran Seyd… Qu’il ne s’éveille pas ! »