Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/12

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n’ai jamais vue ; mais je connais à la rigueur des gens qui la connaissent.

« Se peut-il bien, ma chère Mathilde, que jusqu’à ce jour tu n’aies pas entendu parler de Mme Corneuil ? J’en suis fâché ; cela prouve que tu es une femme sans littérature, une femme qui ne lit rien, pas même la Gazette des tribunaux. Ne va pas t’imaginer là-dessus que Mme Corneuil soit une recéleuse ou une empoisonneuse, ni qu’elle ait jamais comparu en cour d’assises ; mais, il y a de cela sept ou huit ans, elle s’est séparée de M. Corneuil. Cette affaire fit quelque bruit ; voici l’histoire, autant qu’il m’en souvient :

« M. Corneuil était jadis consul général de France à Alexandrie. Il passait pour un bon agent, à qui l’on reprochait seulement d’avoir l’humeur un peu brusque. C’est un péché véniel. Dans le pays du courbache, il faut savoir dans l’occasion brusquer les hommes et les choses. Quand un Oriental n’est pas de votre avis et qu’il vous demande trop cher pour en changer, le seul moyen de le convaincre est de l’étrangler ; mais ceci n’est pas de mon sujet. Un hasard heureux pour les uns, malheureux pour les autres, fit débarquer sur les quais d’Alexandrie un certain M. Véretz, petit agent d’affaires, qui en avait fait de mauvaises à