Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/223

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il abandonna la partie. Il avait hérité de son père, qui s’était enrichi dans le commerce du bétail, une fortune assez rondelette. Il se retira fièrement sous sa tente, c’est-à-dire à Goerlitz, où il fonda une feuille hebdomadaire, intitulée das Licht, ou la Lumière. Celui de ses ex-collègues qu’il avait traité d’asinus ridiculissimus écrivit contre lui un sanglant article dans les Grenzboten ; il y décriait sans merci son journal et accusait le directeur d’être une lanterne fumeuse qui se prenait pour le soleil. M. Drommel méprisa ces injures et ne se lassa point d’éclairer l’univers. Ses abonnés assurent qu’il les étonne plus qu’il ne les convainc. Cela suffit à son bonheur.

M. Drommel n’est pas seulement un penseur et un polémiste ; dans l’occasion, il sait se remuer, tracasser, s’intriguer. Après une tentative infructueuse, il réussit à se faire élire au parlement impérial, où il siégea dans le voisinage des socialistes, mais sans frayer avec eux. Il les considérait comme de pauvres hères, car il n’est pas socialiste, il est sociologue, et vous en sentez la différence. Si le prince de Bismarck avait daigné prendre quelquefois ses avis et se gouverner par ses conseils, il serait peut-être devenu bismarckien ; mais le prince de Bismarck ne lui ayant point fait d’avances et