Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/49

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que je me suis absolument mépris sur ton compte. Comment ! c’est toi, mon fils, toi que je croyais le garçon le plus sensé, le plus réfléchi, le plus tranquille de la terre, c’est toi qui tout à coup t’avises de jeter l’épouvante dans le sein de ta famille par une décision !…

— Extravagante et bizarre, interrompit Horace.

— Puisque je t’ai dit que j’avais retiré ces deux mots ! Mais, oui ou non, ce projet de mariage ne ressemble-t-il pas à un coup de tête ?

— Dois-je vous répondre article par article ? s’écria-t-il, ou préférez-vous me réciter d’abord votre discours tout entier d’une seule haleine ?

— Non, ce serait trop fatigant. Réponds tout de suite.

— Eh bien ! mon cher oncle, sachez que vous ne vous êtes jamais mépris sur mon compte, et que ce prétendu coup de tête est précisément l’acte le plus sensé, le plus réfléchi que m’ait jamais inspiré mon bon génie, un acte où j’ai mis à la fois tout mon cœur et toute ma raison.

— Quoi donc ! tu me défendras de m’étonner que l’héritier d’un beau nom et d’une belle fortune, qu’un comte de Penneville, qui pouvait choisir dans son monde parmi cinquante jeunes filles vraiment dignes de lui, refuse tous les partis que