Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/76

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oiseux, il se mit à conter avec agrément plusieurs anecdotes de sa carrière de diplomate, qu’il assaisonna de belle humeur et de sel attique.

Tout en contant, il devisait avec lui-même et se disait : « Il n’y a pas à dire, elle est fort belle ; c’est une maîtresse femme, un morceau de roi. Quels yeux, quels cheveux et quelles épaules ! Je gagerais que ce qu’on ne voit pas vaut pour le moins ce qu’on voit. Est-il possible qu’elle soit la fille de sa mère et que ces cheveux rouges aient produit ces cheveux blonds ? Après tout, elles se complètent. C’est une frégate accompagnée de sa mouche. Il n’y a pas à dire, sa beauté m’irrite, m’exaspère. Elle était faite pour se rendre heureuse en faisant le bonheur de beaucoup de pauvres diables, et, si j’avais quarante ans de moins, je voudrais être du nombre de ces heureux. Mon Dieu ! je ne demanderais pas le morceau tout entier pour moi, je me contenterais de ce qu’on voudrait bien me donner. Il faut être philosophe et savoir partager. Hélas ! les prétentions ont tout gâté ; l’ambition, la fureur de paraître, sont le fléau du genre humain ; la femme qui veut à toute force jouer un rôle tue son bonheur et celui des autres… En conscience, elle est superbe ! N’y trouverai-je rien à redire ? Oui, elle a dans le regard