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Page:Chergé - Guide du voyageur à Poitiers et aux environs, 1872.djvu/204

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MONTIERNEUF.


Fondée en l’année 1077 par Guillaume Guy-Geoffroy, comte de Poitiers et duc d’Aquitaine, l’abbaye de Montierneuf fut placée, dès l’origine, sous la règle de Saint-Benoît et sous la direction de l’abbaye de Cluny, et elle fut richement dotée par son puissant protecteur qui ordonna, en mourant à Chizé, en 1086, que ses restes fussent déposés au milieu des bons moines dont il réclamait les prières, après avoir souvent fraternisé avec eux.

En effet, il leur avait voué une amitié toute particulière, et, lorsqu’il résidait à Poitiers, il ne laissait point s’écouler de jour sans descendre au moustier neuf. S’il venait de courses lointaines, ou même après une courte absence, il ne mettait les pieds dans son palais qu’après avoir visité ses seigneurs. Il se rendait lui-même à la cuisine, demandait au cellerier quel devait être l’ordinaire du jour, et, s’il apprenait qu’il se composât d’œufs, de fromage ou de maigres poissons, aussitôt il ordonnait au pourvoyeur de préparer des mets plus délicats, et à son trésorier de les payer.

Guillaume fut très-regretté, cela se conçoit aisément, et nous trouvons un témoignage authentique de ce sentiment fort naturel dans la prose émue d’un chroniqueur du temps, le moine Martin.

Suivant ses intentions, le prince fut enterré dans l’abbaye.

Montierneuf éprouva le sort de toutes les fondations religieuses. D’abord riche et puissante, cette abbaye vit s’accroître, par les donations des comtes de Poitou, et même des rois d’Angleterre, devenus ducs d’Aquitaine, ses immenses possessions ; puis elle vit baisser peu à peu, avec l’ardeur de la foi, le zèle des donateurs, et après les guerres de religion qui ensanglantèrent la patrie et firent autant de ruines des beaux monuments qui couvraient le sol français, elle déclina rapidement.

Nous avons vu une portion des bâtiments claustraux enclavée dans la caserne de cavalerie que nous venons de visiter à l’instant, et formant le corps du milieu de cet établissement militaire : il ne fallait rien moins qu’une