Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/206

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de pas en le secouant terriblement, et finit par le jeter sur la route, où il tomba de tout son long, devant son cheval hennissant d’effroi.

Comme l’auto tournait le coin dans un magnifique virage, les détectives purent voir les anarchistes qui se répandaient dans la rue. Les premiers arrivants mirent pied à terre pour relever leur chef.

— Je ne puis comprendre que la nuit soit tombée si tôt, dit le professeur à voix basse.

— C’est un orage qui se prépare, dit le docteur Bull. Quel dommage que nous n’ayons pas de lanterne, ne fût-ce que pour y voir !

— Nous en avons une ! s’écria le colonel en ramassant dans le fond de la voiture une lourde lanterne démodée en fer forgé.

C’était, évidemment, un objet fort ancien. Sa destination première avait dû être religieuse, car, sur l’un de ses côtés, elle portait une croix, grossièrement figurée.

— Où donc avez-vous trouvé cela ? demanda le professeur.

— Où nous avons trouvé l’auto, répondit le colonel, chez le meilleur de mes amis. Pendant que notre chauffeur s’escrimait contre le volant, j’ai couru à la porte, où se tenait Renard qui nous regardait partir. « Je pense, lui ai-je dit, qu’il n’est plus temps de chercher une lampe. » Il leva les yeux en souriant aimablement vers le splendide plafond voûté de son vestibule : cette lanterne y était sus-