Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/229

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tenir. Fallait-il laisser Gogol dehors et commencer diplomatiquement ? Valait-il mieux l’introduire et mettre le feu aux poudres aussitôt ? Syme et Bull tenaient pour ce dernier parti et l’emportèrent, malgré cette observation du secrétaire :

— Pourquoi attaquer Dimanche si témérairement ?

— C’est bien simple, avait répondu Syme, je l’attaque témérairement parce que j’ai peur de lui.

Ils suivirent Syme en silence par l’escalier obscur, et tous simultanément émergèrent au grand soleil du matin et au grand soleil du sourire de Dimanche.

— Charmé, dit le Président, charmé de vous voir tous réunis ! Quelle belle journée ! Le Tsar est-il mort ?

Le secrétaire, qui se trouvait être le plus voisin de Dimanche, répondit avec une extrême dignité et encore plus de sévérité :

— Non, Monsieur. Il n’y a pas eu de sang. Je n’ai pas à vous décrire le spectacle révoltant de…

— Spectacle révoltant ? répéta le Président sur un ton interrogatif. Peut-être voulez-vous parler du spectacle que nous offre le docteur Bull, avec ses lunettes ?

Le secrétaire resta muet, interloqué.

Le Président poursuivit, et son intonation invitait à l’indulgence :

— Je sais bien que chacun a sa manière de voir, et aussi ses yeux. Mais traiter de révoltant le spec-