Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/240

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vague espoir d’une indication quelconque, fit arrêter son cab et ramassa l’objet. C’était un paquet volumineux, adressé à Gogol en personne. Gogol le trouva composé de trente-trois feuilles de papier, serrées les unes sur les autres ; la dernière qui se réduisait à une étroite bande portait cette inscription :

« Le mot, selon moi, doit être rose. »

Celui qu’on avait nommé Gogol ne dit rien, mais les trépignements de ses mains et de ses pieds suggéraient l’image d’un cavalier qui presse sa monture.

Rue après rue, quartier après quartier, furent ainsi traversés par ce prodigieux éléphant de course. Des têtes curieuses apparaissaient à toutes les fenêtres. La circulation se trouvait rejetée sur les trottoirs.

Comme les trois cabs se maintenaient avec exactitude dans le sillage de l’éléphant, les badauds finirent par croire à quelque cortège : une réclame, peut-être, pour un cirque. Et ce cortège dévorait l’espace avec une vitesse qui passe toute imagination. Syme aperçut l’Albert Hall de Kensington, alors qu’il se croyait encore à Paddington. L’allure de l’éléphant s’accéléra dans les rues vides de l’aristocratique quartier de South Kensington. Il se dirigea enfin vers le point de l’horizon où apparaissait l’énorme roue d’Earl’s Court. La roue grandit, grandit jusqu’à remplir tout le ciel, comme la roue des étoiles.