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Page:Chesterton - Le Retour de Don Quichotte.djvu/123

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derrière lui, avec une inclination courtoise, mais la ferma aussitôt à clef.

De tout ceci, le magistrat n’avait rien entendu, car tout s’était exécuté avec célérité et discrétion, grâce à ce mécanisme qui ronfle sans bouger comme une toupie. La première notion qu’il en eut fut un coup frappé à sa porte et une voix disant : « Par ici, Docteur ». Dans les cas semblables, le médecin responsable de l’internement devait voir d’abord en tête-à-tête le magistrat, qui avait ensuite avec la victime une entrevue généralement beaucoup plus brève. Cet après-midi, en particulier, M. Wotton espérait que les deux entrevues seraient très courtes. Il ne leva pas le nez de ses papiers et dit seulement :

— C’est le dossier no 9.871, n’est-ce pas ? Un cas de folie de la persécution, je crois ?

Le Docteur Hendry inclina la tête de son air le plus affable :

— La persécution est évidemment un symptôme plutôt qu’une cause, dit-il ; la cause est purement physique… purement physique. — Il toussa discrètement. — De nos jours, il n’est pas nécessaire de rappeler que les altérations des sens réagissent sur le cerveau, n’est-ce pas ? Dans le cas présent, j’ai les plus fortes raisons de supposer que le désordre a commencé par une maladie très banale du nerf optique. Le procédé par lequel j’ai atteint cette conclusion est assez intéressant en lui-même.

Au bout de dix minutes, il devint manifeste que ce n’était pas l’avis de M. Wotton.

La tête toujours penchée sur ses papiers, il ne regardait pas son interlocuteur. S’il l’avait fait, les vêtements extraordinairement usés de celui-ci auraient peut-être éveillé ses soupçons. Il entendait