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Page:Chevalier - Les Pieds-Noirs, 1864.djvu/178

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CHAPITRE XXVI

La nuit


Quoique les mouvements du cheval fussent loin d’être agréables à Saül Vander, il possédait trop de philosophie pour se plaindre. Ce n’était certes pas la première fois qu’il avait à souffrir des éventualités de la vie aventureuse qu’il menait depuis longtemps. Il endurait avec patience et courage ses cuisantes douleurs, allégées, au surplus, par la pensée de revoir sa fille. Kenneth et lui chevauchèrent, en causant, jusqu’à ce que le soleil commençât à se pencher à l’occident.

— Avez-vous jamais lu Don Quichotte ? lui demanda le jeune homme.

— Je ne pense pas, répondit Saül en secouant la tête. Il se peut, pourtant, que j’en aie entendu parler par Bouton-de-rose.

— J’allais dire que vous me rappelez ce brave chevalier, après sa vaillante bataille avec les moulins-à-vent ou sa piteuse aventure avec les bergers et leurs troupeaux.

— Oui-da ; mais comme je ne sais rien de cela, la comparaison est perdue. Je puis parler d’homme blanc et d’homme rouge ; de renard argenté, roux et bleu ; de loutre et castor ; élan et bison ; ours gris et polaire ; panthère et loup ; mais je ne me connais pas plus en histoire qu’un Sioux. Un peu plus d’instruction m’aurait bien servi ; mais dans le cercle où je me meus, ça ne fait pas grande différence. Pour Sylveen, ajouta-t-il avec orgueil, elle sait un peu de tout. Il faut l’entendre lire. Sa voix résonne pour moi, comme