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CHAPITRE XII

Le tueur mystérieux


En rentrant au camp, Kenneth remarqua que le factionnaire, posté sur sa route, n’était pas visible, quoique le ciel se fût un peu éclairci depuis une heure. Frappé de cette circonstance, il s’approcha de l’endroit où devait se tenir ce factionnaire, en l’appelant par son nom, de peur d’être pris pour un ennemi. Et, comme il ne recevait pas de réponse, il crut que la sentinelle s’était endormie. Aussi avança-t-il hardiment, sans aucun soupçon, et ne fut-il pas étonné de trouver l’homme étendu à terre.

— Pauvre diable, murmura-t-il, la fatigue l’a vaincu. Je m’en vais achever sa garde.

En même temps, Iverson se baissait pour prendre la carabine du trappeur. Mais la main qui tenait cette arme était roide. L’homme avait cessé de vivre ; ses doigts serraient fortement la crosse de la carabine. Iverson examina le cadavre. Un instrument aigu — un couteau sans doute — lui avait percé le sein gauche et traversé le cœur. La blessure était récente, et le sang coulait lentement encore par l’orifice. Ce coup fatal n’avait pas satisfait la cruauté de l’assassin, car les artères carotide et trachéale étaient tranchées par une coupure qui s’étendait d’une oreille à l’autre et séparait presque la tête du tronc. Une couronne rouge sur le crâne montrait encore que l’infortuné avait été scalpé, et sa chevelure emportée pour servir de trophée.