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Page:Chevalier - Les derniers Iroquois, 1863.djvu/110

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— Que ma mère cesse de craindre, dit-il, avec une certaine hauteur, en s’arrachant aux embrassements de l’Indienne ; le chef est dans une retraite que les Visages-Pâles ne pourront atteindre.

— Mais Co-lo-mo-o a couru des dangers ? demanda Ni-a-pa-ah d’un ton timide.

Co-lo-mo-o est le fils d’un noble sagamo ; le danger lui plaît, dit laconiquement le Petit-Aigle.

— La bête-à-feu[1] flottante a éclaté ? interrogea encore l’Onde-Pure en examinant avec inquiétude son fils à la lueur d’une torche.

Celui-ci ne jugea pas à propos de répondre.

— Le chef a-t-il des provisions ? s’enquit-il.

— Il a emporté de la poudre et des balles. Mais Co-lo-mo-o ne me racontera-t-il pas comment il a échappé à l’incendie qui, disait-on ce soir dans le village, a détruit le grand canot des blancs ?

— Il ne s’agit pas de moi maintenant, mais du chef, ma mère, vous devriez le savoir, répliqua le jeune homme avec la sévérité d’un sagamo du désert s’adressant à l’une de ses squaws.

Ce n’était point que Co-lo-mo-o n’aimât Ni-a-pa-ah ; mais un orgueil insoutenable le possédait. Pour lui, la femme était un être inférieur tenue envers l’homme à

  1. C’est le nom donné par les Indiens aux bateaux à vapeur : ils appellent bête-à-feu, sans qualificatif, les locomotives de chemins de fer, et, par extension, les convois.