sa bouche, je la lui arracherai pour la donner à manger à mes chiens !
— Tu as entendu, jeune fille, fit gravement Poignet-d’Acier. Va, et rappelle-toi ton serment.
— Ce que Hi-ou-ti-ou-li a promis à Co-lo-mo-o, elle l’observera avec autant de régularité que le soleil observe son cours, répondit l’Indienne en embrassant le Petit-Aigle dans un long regard, comme si elle prévoyait, hélas ! que ce regard était le dernier, qu’elle ne reverrait plus le fils de Nar-go-tou-ké.
Pendant que, un à un, les acteurs de cette scène se baissaient et s’introduisaient sous les halliers pour rentrer à l’intérieur de l’îlot, la Fauvette-Légère monta dans son canot et quitta lentement le rivage, en se laissant glisser le long de la corde qui leur avait servi pour atterrir.
Elle espérait que Co-lo-mo-o lui adresserait un mot, un signe, un coup d’œil. Mais soit qu’il craignît d’offenser son père, soit qu’il ne pensât plus à elle, Co-lo-mo-o se plongea sous les broussailles, sans se tourner vers la pauvre Indienne.
Fatal oubli, il fut la perte de la Fauvette-Légère.
Le sang s’arrêta dans ses veines ; son cœur se glaça ; un tourbillon passa sur ses yeux ; ses doigts détendus lâchèrent le câble protecteur, et la malheureuse Iroquoise, entraînée avec la rapidité de la foudre, sur la cataracte qui rugissait à cent brasses de là, fut mise en pièces avec sa frêle embarcation.