Page:Chevalier - Peaux-Rouges et Peaux-Blanches, c1864.djvu/261

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unique repos ! murmura le Mangeux-d’Hommes avec douceur. Moi aussi j’aime à rêver ici, devant ces tombes qui parlent si éloquemment dans leur profond silence, alors que l’oreille est réjouie par le concert de la grive, de l’oiseau jaune, de l’oiseau bleu, de ce robin à la gorge écarlate, du whip-poor-whip[1] dont le chant étrange ouvre carrière aux méditations de l’homme réfléchi.

Ces paroles singulières dans la bouche d’un être comme le Mangeux-d’Hommes furent prononcées d’un ton si simple que Dubreuil jeta sur son interlocuteur un regard tout surpris.

Mais aussitôt celui-ci changea de gamme :

— On t’appelle ?… dit-il impérativement.

— Adrien.

— Je sais, je sais, fit Jésus avec impatience. Mais, ton nom de famille, tu en as un ?

— Sans doute. — Quel est-il ?

— Que vous importe de le savoir ?

Le Mangeux-d’Hommes fronça les sourcils. Dubreuil craignit qu’il ne se livrât à une de ces fureurs aveugles auxquelles il était sujet quand un de ses hommes n’obéissait pas avec la rapidité désirée. Mais le signe de

  1. Espèce de tiercelet dont le cri a quelque chose d’humain. C’est surtout le soir et la nuit qu’il se fait entendre.