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Page:Chevalley - Le Roman anglais de notre temps.djvu/30

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dont l’effet est de montrer jusque chez les êtres vivants certains phénomènes comparables à ceux des révolutions dans les sociétés. Il ne faut point se berne de métaphores, prendre une espèce littéraire pour une espèce animale. Mais, à titre de similitude, on peut dire que le roman britannique, pendant sa courte histoire, se comporte comme ces plantes dont le botaniste de Vries a prouvé l’aptitude particulière à varier soudain dans tous les sens. Il est un des meilleurs exemples dans la littérature de cette mutabilité par explosion qui succède, sans les exclure, aux longues périodes évolutives. Dans sa courte et vivante histoire, il semble bien qu’il y ait eu trois au moins de ces élans révolutionnaires, dont le dernier, au début du XXme siècle, n’est peut-être pas le moins curieux.

Sans doute, le roman picaresque avait popularisé l’atmosphère de brigandage et d’aventures où le roman anglais avec Defoe et Smollett recommencera de s’ébattre. Dans la période qui précède immédiatement son éclosion, le Francion de Sorel, et surtout le Roman bourgeois de Furetière, avaient préparé les voies à une réaction britannique contre les bergeries et les chevaleries où s’attardait l’âge pourtant bien prosaïque de la Restauration. Après Defoe, l’imitation de Lesage peut avoir inspiré Fielding, et celle de Marivaux, Richardson. Mais l’abîme n’en est pas moins immense entre le roman tel que l’a pris la grande et courte période du XVIIIme siècle et le roman tel qu’elle l’a laissé. Le même nom convient mal aux deux variétés.


Un petit imprimeur tout rond, débordant de facilité verbale, indifférent à l’action, pétri de sentiment et de morale à fleur de peau, très féminin et très pratique,