Page:Choderlos de Laclos - Les Liaisons dangereuses, 1869, Tome 2.djvu/114

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affreux d’avoir à redouter des maux, dont peut-être je suis la cause. Grand Dieu ! cette idée désespérante me poursuit & déchire mon cœur ; ce malheur me manquait, & je sens que je suis née pour les éprouver tous.

Adieu, ma chère amie ; aimez-moi, plaignez-moi. Aurai-je une lettre de vous aujourd’hui ?

Paris ce 16 octobre 17…

Lettre CXV.

Le vicomte de Valmont à la marquise de Merteuil.

C’est une chose inconcevable, ma belle amie, comme aussitôt qu’on s’éloigne on cesse facilement de s’entendre. Tant que j’étais auprès de vous, nous n’avions jamais qu’un même sentiment, une même façon de voir ; & parce que, depuis près de trois mois, je ne vous vois plus, nous ne sommes plus de même avis sur rien. Qui de nous deux a tort ? sûrement vous n’hésiteriez pas sur la réponse ; mais moi, plus sage, ou plus poli, je ne décide pas. Je vais seulement répondre à votre lettre, & continuer de vous exposer ma conduite.

D’abord, je vous remercie de l’avis que vous me donnez des bruits qui courent sur mon compte ; mais