mon retour, souper hors de chez moi. Valmont vint me voir à cinq heures ; jamais il ne m’avait paru si tendre. Il me fit connaître que mon projet de sortir le contrariait, & vous jugez que j’eus bientôt celui de rester chez moi. Cependant, deux heures après, & tout à coup, son air & son ton changèrent sensiblement. Je ne sais s’il me sera échappé quelque chose qui aura pu lui déplaire ; quoi qu’il en soit, peu de temps après, il prétendit se rappeler une affaire qui l’obligeait de me quitter, & il s’en alla : ce ne fut pourtant pas sans m’avoir témoigné des regrets très vifs, qui me parurent tendres, & qu’alors je crus sincères.
Rendue à moi-même, je jugeai plus convenable de ne pas me dispenser de mes premiers engagements, puisque j’étais libre de les remplir. Je finis ma toilette, & montai en voiture. Malheureusement mon cocher me fit passer devant l’Opéra, & je me trouvai dans l’embarras de la sortie ; j’aperçus à quatre pas devant moi, & dans la file à côté de la mienne, la voiture de Valmont. Le cœur me battit aussitôt, mais ce n’était pas de crainte ; & la seule idée qui m’occupait était le désir que ma voiture avançât. Au lieu de cela, ce fut la sienne qui fut forcée de reculer, & qui se trouva à côté de la mienne. Je m’avançai sur-le-champ : quel fut mon étonnement, de trouver à ses côtés une fille, bien connue pour telle ! Je me retirai, comme vous pouvez penser, & c’en était déjà bien assez pour navrer mon cœur ; mais ce que vous aurez peine à croire, c’est que cette même fille, apparemment instruite par une odieuse confidence, n’a pas quitté la portière de