Page:Choderlos de Laclos - Les Liaisons dangereuses, 1869, Tome 2.djvu/235

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défendent avec tant de mollesse pour toutes les autres. Apprenez-leur encore à savoir entendre l’éloge de leur maîtresse, sans se croire obligés d’en faire les honneurs ; & si vous leur permettez de vous regarder dans le cercle, qu’ils sachent au moins auparavant déguiser ce regard de possession si facile à reconnaître, & qu’ils confondent si maladroitement avec celui de l’amour. Alors vous pourrez les faire paraître dans vos exercices publics, sans que leur conduite fasse tort à leur sage institutrice ; & moi-même, trop heureux de concourir à votre célébrité, je vous promets de faire & de publier les programmes de ce nouveau collège.

Mais jusque là je m’étonne, je l’avoue, que ce soit moi que vous ayez entrepris de traiter comme un écolier. Oh ! qu’avec toute autre femme, je serais bientôt vengé ! que je m’en ferais de plaisir ! & qu’il surpasserait aisément celui qu’elle aurait cru me faire perdre ! Oui, c’est bien pour vous seule que je peux préférer la réparation à la vengeance ; & ne croyez pas que je sois retenu par le moindre doute, par la plus légère incertitude ; je sais tout.

Vous êtes à Paris depuis quatre jours ; & chaque jour vous avez vu Danceny, & vous n’avez vu que lui seul. Aujourd’hui même votre porte était encore fermée ; & il n’a manqué à votre suisse, pour m’empêcher d’arriver jusqu’à vous, qu’une assurance égale à la vôtre. Cependant je ne devais pas douter, me mandiez-vous, d’être le premier informé de votre arrivée ; de cette arrivée dont vous ne pouviez pas encore me dire le jour, tandis que vous m’écriviez la