Page:Chodzko - Légendes slaves du moyen âge (1169–1237), 1858.djvu/113

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ce qui était arrivé à Strézo. Mais Sabba, tout en remerciant Dieu, pleurait de regret que son ennemi n’eût pas voulu se repentir. Arrivé près de son frère Étienne, il apporta à tous des paroles de paix et d’amour. Tous, pénétrés de reconnaissance envers Dieu, exaltèrent le mérite du saint et en prirent congé tranquilles et rassurés sur leur sort.

Le saint, après ce séjour prolongé à Stoudénitza, bien qu’à l’apogée de la gloire et des honneurs, regrettait souvent ses heures de silencieuse retraite au mont Athos, ces prières qui, partant du cœur, éclairaient sa raison et entretenaient la vie de l’âme. Ne pouvant cicatriser les blessures d’un cœur piqué du désir de rentrer dans le silence, saint Sabba prit les dispositions nécessaires à Stoudénitza, établit à sa place un habile égoumène, et alla couvrir de baisers la tombe de son père. Il se rendit ensuite chez l’autocrate, son frère, pour l’embrasser avant son départ définitif ; mais Étienne, qui eût plutôt consenti de se séparer de son âme que de Sabba son frère, reçut cette nouvelle avec un vif chagrin qui fut partagé par tous les seigneurs de Serbie. Le saint promit et leur donna sa parole de revenir vivre avec eux, et ce ne fut qu’alors qu’ils consentirent à son départ. L’autocrate se chargea de fournir tout le nécessaire, soit pendant le voyage, soit dans le mont sacré, pour le monastère et pour les ermites. Il lui donna donc beaucoup d’or, et il l’accompagna à la tête de la noblesse du pays jusqu’aux frontières grecques, où ils se séparèrent. En arrivant à son monastère de Khilandar, le saint y fut l’objet de nombreuses visites des Pères du mont Athos qui, dans son arrivée, voyaient celle d’un ange céleste, et accouraient tous pour le voir et l’embrasser. Sans plus tarder, il se retira dans son silencieux ermitage de Carey, réjoui en esprit et savourant les délices d’une vie toute consacrée aux pensées divines. L’orthodoxe Étienne, son frère, lui écrivait souvent pour le rappeler en Serbie. Sabba, ne voulant pas renoncer au vœu du silence, préférait causer du chagrin à son frère pour un temps plutôt que d’offenser Dieu. Après quoi, par les motifs inhérents à la volonté divine, la myrrhe des reliques du bienheureux Syméon cessa tout à coup de couler. L’autocrate et les autres s’en affligeaient beaucoup, et ils envoyaient