Page:Chodzko - Légendes slaves du moyen âge (1169–1237), 1858.djvu/23

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votre arrivée, celui que vous, cherchez s’est renfermé dans le monastère russien de saint Pantaléon, et y demeure depuis. À cette nouvelle, les officiers de l’ambassade quittent le chemin qui les conduisait chez le Prote, et se rendent au plus vite dans le monastère désigné. Ils y entrent inopinément et y trouvent celui qu’ils recherchent, ce qui les réjouit au point que, dans l’enivrement de leur joie, ils oublièrent le malaise et les fatigues d’un si lointain et si rapide voyage. Après avoir pris du repos, ils se demandèrent l’un à l’autre comment ils devraient s’y prendre pour le ramener à la maison paternelle. Ils furent d’abord d’avis de lui mettre les menottes, mais le cœur leur manqua, et ils eurent honte de porter la main sur leur maître ! Ils usèrent donc le moins possible de violence, se contentant de disposer des sentinelles, de manière qu’il fût sévèrement gardé à vue. En même temps ils firent reposer hommes et chevaux, pour pouvoir regagner leurs foyers au premier signal.

Le jeune prince observait tout cela : il était frappé de preuves de l’amour ardent que ses parents avaient pour lui et du zèle qui leur inspira l’idée d’envoyer dans un pays étranger le plus haut magistrat, choisi parmi les vaïvodes de la Serbie. Il en était si humilié qu’il n’osait lever les yeux vers le vaïvode. Enfin il le prend en tête à tête et le conjure avec instances de le laisser continuer l’œuvre qu’il s’est proposée et pour laquelle il avait déjà quitté ses parents, méprisé tout, ne voulant plaire qu’à Dieu. Le vaïvode lui répondit en peu de mots : Si, lorsque nous t’avons découvert, toi notre Seigneur, nous t’eussions trouvé ayant déjà embrassé l’état monastique, nous eussions eu tous deux un prétexte pour ne pas agir et différer l’exécution de mes instructions ; mais puisque, par la volonté de Dieu, nous te voyons tel encore que tes parents le désirent, comment pourrais-je éluder leurs ordres ? C’est pourquoi je t’en supplie, mon Seigneur, de n’y plus penser. Viens avec nous, tes esclaves, content et heureux de pouvoir calmer la douleur de tes parents. Il n’y a que ton retour chez eux qui, comme un baume salutaire, pourra cicatriser les blessures de leurs cœurs. Je dois pourtant déclarer que, dans le cas où tu serais d’un avis contraire, et ne voudrais retourner de bon