Page:Chodzko - Légendes slaves du moyen âge (1169–1237), 1858.djvu/65

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Cette déclaration, faite devant tous, fut suivie d’un tonnerre de cris de détresse et de désespoir qui éclatèrent tout à coup, accompagnés de clameurs, de sanglots et de supplications des seigneurs, qui n’épargnaient ni les larmes ni les plus douces paroles pour détourner le prince de son projet de départ. Il ajouta : « Je vous en supplie, tranquillisez mon cœur, et ne m’empêchez point, car je ne saurais plus supporter l’éloignement de mon fils, qui est, après Dieu, mon père spirituel, mon maître et mon guide. » Là-dessus retentit un cri unanime : Que la volonté du Seigneur soit faite ! — Alors l’autocrate appelle son fils aîné Étienne, et aussi Sa Sainteté l’évêque Kyr Callinique. Entourés de tout le saint concile et de tous les seigneurs, ils entrent dans l’église des saints apôtres Pierre et Paul. Après le service divin, l’évêque et l’autocrate imposèrent les mains à Étienne, proclamé dès lors souverain et autocrate de Serbie. Le couronnement du nouveau tzar se fit avec tout le cérémonial usité, et la joie se ranima aussitôt que chacun des assistants, récompensé selon ses services et sa fidélité, eût été congédié à son tour. Le lendemain de cette mémorable journée, le père accompagné de son fils, le tzar nouvellement oint, l’évêque, la tzarine mère et leurs enfants, partirent pour le monastère de Stoudenitza, fondé et doté par lui. Après une messe célébrée par Sa Sainteté Callinique, le tzar père reçut la tonsure monastique, et changea son nom d’Étienne en celui de Syméon le Moine. Son épouse, la grande-duchesse Anna, reçut la tonsure, et prit le nom d’Anastasie la Moinesse. Elle rassembla une congrégation de filles, et s’enferma avec elles dans un monastère de religieuses. Là, jeûnant et priant, elle travaillait à l’œuvre de Dieu ; elle lui demeura fidèle jusqu’à ce qu’elle fut appelée là-haut pour entrer, chez son Seigneur, en jouissance des félicités éternelles. Quant à saint Syméon, il resta avec les autres moines dans le monastère de Stoudenitza, pour accomplir la loi des jeûnes.

Peu de temps après, il prit beaucoup d’or et des vases destinés au service, et se mit en route pour la montagne sainte d’Athos, afin d’y rejoindre son fils, le bienheureux Sabba. Le nouvel autocrate Étienne et tous les nobles seigneurs accompagnèrent le père jusqu’aux frontières grecques, où, après