Page:Chodzko - Légendes slaves du moyen âge (1169–1237), 1858.djvu/89

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en m’octroyant la faveur de participer au règne du Christ. Sois béni par notre Seigneur, pour m’avoir procuré cette béatitude éternelle : Dieu s’est souvenu de tes bonnes œuvres, des prières et des aumônes que tu avais faites pour moi. Tu trouveras un jour les biens qui te sont déjà préparés comme récompense, et qui t’attendent ici avec moi. Mais il faut qu’auparavant tu reçoives de la part de Dieu la consécration et l’autorité archiépiscopales pour lier et délier les hommes de leurs péchés, ainsi que pour éclairer et instruire ta patrie, et ramener tes compatriotes au Christ. Tu iras encore une fois faire un pèlerinage aux lieux saints, et servir de modèle des vertus chrétiennes. Ce n’est qu’après t’être acquitté de tout cela, que tu pourras venir nous rejoindre et recueillir des dons nombreux que Dieu t’a octroyés pour avoir bien mérité de moi et de ton prochain. Alors Sabba, le saint, qui, dans le monde de l’intuition, ne voyait que ce qui se passait au dedans de son cœur, se sentit tout rempli d’aise, de joie et d’ineffables délices. Il croyait être non pas sur la terre, mais au paradis ; élevant ses mains vers le ciel et pleurant, il le remercia des grandeurs et des merveilles que Dieu fait pour ceux qui l’aiment. Notre saint suffisait à tout, pouvant à discrétion puiser dans les trésors de son frère l’autocrate Étienne, qui l’aimait beaucoup. Aussi ses aumônes, distribuées à tous ceux qui en avaient besoin, étaient-elles innombrables, et notre récit se prolongerait trop s’il nous fallait les énumérer. Nous les abrégeons donc en nous résumant par quelques citations seulement. Il y a dans la montagne sainte le couvent de Caracal, avec une église des Saints apôtres Pierre et Paul. Elle fut alors ruinée et pillée par des corsaires qui, ayant saisi l’égoumène et les prêtres, les conduisirent devant le supérieur de la cathédrale de Saint-Athanase du mont Athos, disant : Si vous ne le rachetez pas, nous allons les décapiter tous, en votre présence. Les prêtres de Saint-Athanase offrirent de payer la rançon, mais à cette condition expresse, que les frères et leur égoumène subiront désormais l’autorité de la cathédrale de Saint-Athanase. La peur de mourir les força d’accepter la proposition, bien qu’ils n’eussent pas voulu se soumettre au chef en question. Aussitôt rachetés et délivrés, ils se rendent chez le bienheureux Sabba et le supplient de restituer