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Page:Choisy - Journal du voyage de Siam, 1687.djvu/252

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Journal

à ſon rang pour retourner à la ville ; & celui qui arrivera le premier au palais, doit avoir un prix conſidérable. C’eſt une choſe à voir, que la viteſſe avec laquelle ils remontent une groſſe riviere fort rapide. Le balon où eſtoit le Roi a gagné le prix, & ſa Majeſté a fait donner à cha cun de ſes rameurs un cati, qui vaut cinquante écus. Il n’a gagné dans une courſe de deux grandes lieuës, que de la longueur de quinze braſſes. Nous avons veu la fête ce matin dans une ſalle préparée exprès pour M. l’Ambaſſadeur ; & aprés-dîné nous eſtions au paſſage dans des balons. Le Roi en paſſant s’eſt tourné pluſieurs fois de notre côté avec un viſage riant. Ho mon Dieu, qu’il m’a fait pitié ce pauvre Roi, quand je l’ai veu dans cette pompe, paſſant entre deux cens mille perſonnes qui bordoient la riviere, & qui les mains jointes & le viſage contre terre lui rendoient les honneurs divins ! Hé le moyen qu’un pauvre homme accoutumé à ces adorations ne s’imagine pas eſtre quelque choſe audeſſus de l’homme ! & qu’il ſera difficile de lui perſuader de ſe ſoumettre à toutes les humiliations de la Religion Chrétienne !

M. Conſtance, qui ne nous a point quitté de toute la journée, a fait tirer ce ſoir un feu devant ſa maiſon pour l’exaltation du Roi d’Angleterre. Il avoit fait élever une double muraille de bambou avec des arcades des deux cotez de ſa rue.