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Page:Choisy - Journal du voyage de Siam, 1687.djvu/26

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Journal

que vous ignoriez ; ſi ce n eſt quelques paroles Siamoiſes. Au moins ſoyez content : je vous abandonne toutes les Langues de l’Europe ; laiſſez-moi une demi-douzaine de caracteres Orientaux : encore neprétens-je m’en ſervir qu’à cinq ou ſix mille lieuës de vous.

Le Pere le Conte a fait une fort jolie exhortation ; car nous en avons tous les Dimanches, & ſi on nous fâchoit, nous en aurions tous les jours. Il y a ici plus d’un orateur : le zele eſt grand dans les prédicateurs, & la docilité extrême dans les auditeurs. Il n’y a pas un mouſſe ſur notre vaiſſeau qui ne veuille aller en Paradis : cela ſuppoſé, le moyen que les ſermons ne ſoient pas bons ?

19 Mars.

UN brouillard fort épais : il nous garantie des ardeurs du ſoleil ; mais il eſt mal ſain, & fait mal à la gorge. Il empêche auſſi de prendre la hauteur, parce qu’il n’y a point (l’horiſon, quand on ne voit pas plus loin que ſon nez. Nos pilotes, ſuivant leur eſtime, nous croyent à 16. degrez 30. minutes, c’eſt à dire par le travers des premieres Iſles du Cap vert. Nous n’avons pas encore veu un oiſeau ni un poiſſon : on ne ſçait ce que cela veut dire. Mais enfin nous allons toujours notre route ; nous ne manquons de rien dans le vaiſſeau ; huit cens lieues