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Page:Choisy - Journal du voyage de Siam, 1687.djvu/338

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Journal

fois ſe promener avec le Gouverneur Hollandois, & il eſt jamais le plus fort. Son pere eſt fort reſſerré, & n’a que deux valets. Son frere eſt priſonnier à Batavie. Ecoutez un plaiſant incident. Voici une chaloupe avec pavillon Hollandois : c’eſt aſſurément un compliment pour M. l’Ambaſſadeur, & les rafraîchiſſemens ſuivront. Il ſort de cette chaloupe un petit homme noir qui vient faire à ſon Excellence une profonde révérence, & la prier très-humblement d’envoyer à M. le Gouverneur ſoixante & dix écus pour les ſix beufs qu’il envoya hier. Cela s’appelle prier un homme à dîner, & lui faire payer ſon écot. M. l’Ambaſſadeur lui a répondu froidement, qu’il payeroit les beufs avec les poules qui devoient venir, & qu’il pouvoit les aller querir. Il s’en eſt allé, & demi-heure aprés nous avons appareillé. Là-deſſus beaucoup de raiſonnemens. Ils ont eu des nouvelles d’Europe. Avons-nous la guerre avec eux ? Ou bien eſt-ce que ce vieux Gouverneur eſt un vilain, qui ne ſçait pas vivre ? Ou bien nous regardent-ils déja comme les amis du Roi de Siam, qu’ils veulent traiter en ennemi. Quoi qu’il en ſoit, ils ſont affinez, & en ont pour leurs ſix beufs. Mais cependant nous n’avons gueres d’eau. On trouve tous les jours des barriques percées de vers ; & j’ai peur qu’avant que nous arrivions au Cap, l’eau ne ſoit bien chere. Je m’en vais faire remplir ma jarre, & je la