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Page:Choisy - Journal du voyage de Siam, 1687.djvu/34

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Journal

traits qu’il m’en fait ; chacun voit par ſes yeux : mais enfin la matiere ſera degroſſie, & nous ne ſerons pas tombez des nuës. Vous ne connoiſſez pas M. V. & pour le connoître, il faut l’entendre parler d’affaires. Perſonne n’en parle mieux que lui : il trouve des expediens à tout ; & Meſſieurs les Miniſtres en ont eſté fort comtens. Il eſt vrai que tout eſt perdu, quand il veut faire le plaiſant : c’eft ſon foible, & ce n’eft pas ſon talent. Je l’écoute quand il parle ſérieuſement ; & quand il veut rire, j’ai des affaires.

Voici une nouvelle du jour. On m’apporte un poiſſon volant ; il reſſemble à un haran, & a ceux petites aîles : il y en a qui en ont quatre. Ils volent juſques à ce que leurs aîles ſoient ſeches, & les mouïllent de temps en temps. Ces aîles {{d|ont d’une ſeule petite écaille blanche & tranſparente. Nous verrons ce ſoir s’il eſt auſſi bon qu’on dit ; je ne me fie plus au goût des Marins, ils ont toujours faim.

Nous ſommes à 8. degrez 50. minutes.

25. Mars.

ON vient enfin de prendre une Bonite : elle reſſemble à une groſſe Carpe. Je n’en mangerai point, parce que je mange de la viande : c’eſt une aſſez bonne raiſon ; & il n’eſt pas juſte qu’ayant quitté la merluche par néceſſité, je retourne a la bonite par délice. Il eſt impoſſible de faire le Ca-