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Papeete au départ de cet officier et des gendarmes, que M. de la Richerie a partagé les rôles. Il n’a dû envoyer personne inutilement. Dans les longues conversations, dont on parlait alors, il aura inculqué ses idées à M. de Kermel, tout absorbé dans ses rêveries creuses, et les gendarmes ne sont pas venus apporter l’ordre à Noukahiva puisqu’il y existait déjà. Le choix fait pour cet envoi suffisait pour en augurer mal.

« Le choix du résident lui-même, homme tellement absorbé qu’on le prend parfois pour un aliéné, condamne M. de la Richerie. Dépositaire de l’autorité, M. de Kermel devait nécessairement, en arrivant à Noukahiva, prendre le commandement et la direction. Mais pour maintenir l’ordre il faut savoir commander, or il en est incapable et ne sait pas se faire respecter des indigènes. »

Nous voyons par cette correspondance qu’envoyer cet officier à Noukahiva, c’était paralyser l’autorité existante sans la remplacer ; c’était arracher les rênes du gouvernement aux mains qui savaient les tenir pour les jeter à l’abandon. M. de la Richerie avait tout calculé, car il connaissait trop bien celui qu’il envoyait pour n’avoir pas prévu toutes les conséquences de cet envoi.

À lui donc toute la responsabilité de ce que la mission de Noukahiva, si prospère en 1860, était ruinée en 1861, et de ce que la barbarie a de nouveau envahi ces îles. À lui la responsabilité, parce qu’il a envoyé ce résident et que toutes les circonstances se réunissent pour prouver qu’il a positivement préparé ce résultat déplorable.

Ses lois et ses poursuites contre le catholicisme à Tahiti, l’opinion exprimée dans les lettres adressées de cette île à Noukahiva lors de l’envoi du résident ; l’inutilité de cet envoi, s’il n’était pas dirigé contre la mission et l’impossibilité de lui assigner un but raisonnable ; l’emploi des moyens les plus dissolvants et les plus propres pour arriver à la destruction ; la hardiesse du résident pour détruire et le soin avec lequel il se retranchait derrière des ordres reçus pour s’abstenir dès qu’il fallait édifier ou retarder la ruine ; enfin les ordres positifs envoyés de Tahiti à différentes reprises « de ne se mêler de rien » alors que la ruine menaçait ou qu’elle était déjà consommée, tout révèle, tout indique et tout montre la pensée, la volonté et la main de M. de la Richerie.

Oh ! combien ces faits permettent de voir dans son vrai jour