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de l’île. D’après ce récit le village, but de la promenade, ne peut être que Gatavake qui est situé de l’autre côté de la montagne et où habitaient les Indiens Tuamotu.

Nous sommes étonné que M. Caillet ait oublié de nommer ce village, et il nous paraît fort étrange que devant aller au-delà des montagnes, et ne venant à Atirikigaro que par suite de circonstances imprévues, il ait trouvé, là où il ne devait point aller, un guet-à-pens dressé à son intention et exigeant un assez grand nombre d’acteurs et de comparses.

Maintenant, voyons ce que disent les Mangarèviens ? Le voici dans toute sa simplicité :

« M. Caillet est descendu de son navire vers quatre heures du soir le 19 décembre. Il avait avec lui des matelots et des Indiens Tuamotu. Ces derniers l’ont accompagné à Atirikigaro. Arrivé dans ce village il a voulu entrer dans la maison de Taïs, femme mariée, qui est la gardienne de l’ouvroir où se réunissent pour travailler les jeunes filles de la baie.

« Taïs ne voulut point permettre à M. Caillet d’entrer dans sa maison qui sert d’ouvroir et elle le lui défendit. Le mari de Taïs défendit aussi à l’étranger d’entrer chez lui. Néanmoins M. Caillet entra, puis il voulut pénétrer dans la chambre où étaient les jeunes filles. Taïs s’y opposa et elle fut même obligée d’employer la force jusqu’au point de le frapper sur les bras et sur la poitrine. Alors M. Caillet commanda à deux Indiens Tuamotu qu’il avait avec lui de se saisir de Taïs, parce qu’il voulait des filles. Mais Niro, chef et gardien de la baie, prit la défense de Tais, il se mit entre elle et M. Caillet et dit à ce dernier de se retirer, car s’il touchait aux jeunes filles, lui, Niro, qui avait la sienne parmi elles, serait obligé de frapper l’agresseur. Alors, M. Caillet, quitta son habit, prit son canif et se jeta sur Niro, et comme celui-ci se sauva il le poursuivit jusqu’au dehors de la maison, puis il revint. Il y eut une longue dispute, mais comme M. Caillet vit qu’il n’était pas le plus fort il céda et essaya de faire la paix avec tout le monde en distribuant du tabac ; puis il dit qu’il ne fallait parler de rien ; mais Niro était déjà allé se plaindre à la Reine et lui demander du secours. M. Caillet le sut et voulut faire punir Niro. »

Tel est le récit des gens de Mangarèva.

Le soir même du 19 décembre M. Caillet demanda à Maria-Eutokia que Niro fût révoqué de ses fonctions, de chef gardien