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le vieux docteur

sant d’été, dans l’horreur des nuits noires d’automne, dans le poudroiement en tempête des neiges froides d’hiver, partout à travers la campagne, dans les enfoncements reculés de son coin de pays… Il se souvenait de son âge d’homme… Il avait été six ans maire, trois ans marguillier, il avait été commissaire d’école aussi.

***

Puis ensuite il se souvenait d’être devenu vieux, vieux tout à coup presque, lui semblait-il… Il n’osait plus sortir la nuit ; il pliait tout de travers, lentement de ses doigts engourdis, le papier de ses poudres ; il ne voulait plus voyager en charrette. Les maris tout effarés qui venaient encore le quérir lui disaient toujours, pendant qu’il endossait son éternel paletot vert, qu’il prenait ses forceps ternis, sa trousse à laquelle il manquait des fioles ; « Dépêchez-vous, docteur », et ceci l’agaçait sans le faire se hâter davantage.

Il ne se sentait plus le goût de l’étude, ne lisait plus ses revues ; il n’avait plus confiance aux médicaments nouveaux : c’était rien que du charlatanisme toutes ces simagrées singées de Paris ou d’ailleurs, ces instructions