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XV


… Pan — pan… pan — pan… pan — pan…

En automne tard, aux premières morsures du froid.

Ils étaient deux qui faisaient depuis le matin cette musique sourde de tambour martelé. L’un brun, l’autre blond ; l’un Claude, l’autre Jacques.

Pan — pan… pan — pan…

Tout vibrait et dansait dans la grange tant les coups drus et vigoureux de leurs fléaux s’abattaient avec force sur l’aire recouverte d’épis. Les grains de blé jaillissaient et se cognaient aux parois planchéiées des « batteries. » En même temps, à chaque coup, la paille, les foins accumulés en « tasseries » subissaient une brève secousse trépidante qui en faisait sourdre une fine poussière de pollen séché.

Les pauvres petits moineaux qui s’étaient tapis pour les jours froids de l’hiver menaçant, dans les jointures des chevrons du toit, se sentaient secoués par un choc persistant et venaient poindre, en voletant au-dessus des piles de foin, leurs têtes inquiètes, pour voir.

Ils jetaient des cris aigus, si drôles et si vifs, qu’on ne savait pas trop si c’en était de plaisir ou de détresse.

Sans cesser la cadence rythmée du battage, Jacques et Claude s’amusaient à les regarder voltiger. Parfois les moineaux s’approchaient peu à peu en