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Page:Choquette - La Terre, 1916.djvu/208

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doucement, avec un ton de lui demander ce qu’elle en pensait.

Mais la réponse, il la connaissait cependant. Lui-même se la faisait. Cet espoir — qui traversait parfois son esprit comme un mirage — de rattacher son fils à la terre, il le sentait à la réflexion de plus en plus improbable.

— « Non, tu n’y crois point, toi non plus, n’est-ce pas, Marcelle ? En effet, ce n’est pas à l’armée, ni dans les camps, que s’avive le goût du sol… Après avoir manié les crosses polies des fusils, ça écorche sans doute trop les mains les rudes mancherons de la charrue. » Il restait longtemps songeur. Il se mettait ensuite à raconter ce qu’il avait fait pendant la journée… ce qu’il se proposait d’entreprendre le lendemain.

— « Et toi, Marcelle, à quoi t’es-tu occupée ?… Jacqueline ne devait-elle point venir ? » Puis d’une voix presque basse, mystérieuse : « Aucune autre nouvelle de Lucas ?… »

Et alors, comme Marcelle répondait toujours par un long mouvement dénégateur et plein de tristesse de la tête, il passait à un autre sujet, afin de balayer tout de suite l’écho de sa question : « Ses vaches n’avaient pas donné grand lait depuis quelques jours… à cause de la chaleur, des mouches sans doute… Il l’emportait encore toutefois sur son voisin Lusignan de plusieurs livres… Quant à la moisson, il n’y avait que la « pièce du puits » de médiocre… tout le reste avait superbe apparence, ainsi que le verger… Il l’amènerait voir ça, jusqu’à l’autre bout de la ferme, une prochaine fois qu’il attèlerait… »