Page:Choquette - La Terre, 1916.djvu/35

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répandre une idée qu’il considérait juste, soit pour raconter quelque délicieuse scène champêtre saisie au cours de ses courses le long du Richelieu, soit simplement pour s’amuser à laisser flotter son esprit dans de naïves fictions — il avait, tour à tour livré à la publicité et des articles sur diverses questions sociales, et, des communications scientifiques et de pures nouvelles littéraires. Et maintenant que sa fille grandissait, qu’il retrouvait chez elle une partie de ses propres goûts, il en avait fait son confident, souvent même son conseiller.

Rien de charmant et de naïf comme cette soudure étroite qui, rajeunissant le père et vieillissant la fille, avait fini par en faire presque deux camarades.

Aussi que d’étiquettes latines à coller sur les bouteilles, que d’onguents, que de poudres n’avaient-ils point préparés de concert, par des soirs comme celui-ci, tout en discourant familièrement sur mille choses, aussi bien sur les cas de médecine traités au cours de la journée que sur les incidents politiques rapportés par les journaux.

Jacqueline était autour de lui la seule personne à laquelle il put s’adresser tout haut ; c’était à elle qu’il soumettait ses opinions, exposait ses théories, communiquait ses idées et ses projets. Il la consultait comme on consulterait un ami de son âge ; moins peut-être, pour obtenir son avis, que pour l’amener à accepter et à approuver son propre sentiment. Il s’en servait en quelque sorte comme d’un sujet d’expérimentation.

Et c’est ainsi qu’en la maintenant ; sans s’en rendre