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L’ŒIL DU PHARE

répondre. Et peut-être sa belle âme réjouie est-elle là pour t’inspirer ces idées qui furent les siennes. Il y a, te dirait-il, ce que l’argent ne donne pas. Représentées par toutes ces choses à jamais intimes et familières qui forment l’aspect du bourg natal, il y a notre préexistence dans l’histoire des ancêtres et notre survie dans l’avenir anticipé de nos enfants. Car quel est celui qui au sein de son foyer n’appréhende pas comme une misère l’exil de ceux qu’il veut y laisser après lui. Et cela, mon Jean, s’appelle l’amour de la patrie. Sans cela, mon Jean, on peut prospérer, s’enrichir, jouir encore, mais non aussi parfaitement que tu veux bien le reconnaître, ce soir, après en avoir toi-même fait la rude expérience.

« Ce sol natal sur lequel tu te sens « si franchement heureux, » n’as-tu pas voulu un jour le déserter, avec désespoir au cœur et l’affront dans l’âme, comme s’il te fut permis de le honnir ? Si après sa récupération apparente sur la terre étrangère ton bonheur n’y est pas complet, c’est que tu avais laissé ici, de toi-même et des tiens, quelque chose qui ne se troque jamais. C’est la