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LA FOURMI CHEZ LES CIGALES

jet de tes premiers sentiments ; dont tu me fais l’éloge mérité depuis notre première année de philosophie, pour qui tu écrivais des vers quand il t’aurait fallu plutôt étayer des syllogismes ; Mlle Lucile Morand, qui t’espère, croit en tes serments et te chérit depuis quatre ans, méritait, certes, de s’appeler un jour Madame Larive.

— Vraiment, tu m’agaces, Eugène. Je ne te reconnais plus. Les rôles sont évidemment changés entre nous. Je viens te parler de choses des plus sérieuses et tu m’embêtes avec tes propos folichons.

— Quoi ! folichons ! les premiers sentiments, les impressions suaves de ton cœur, si longtemps chantés et rimés dans ta poésie, si souvent jurés dans ta prose, aux heures tardives où il t’aurait fallu plutôt étudier, comme à tous les clairs de lune, quand tu aurais fait mieux de dormir !

— Ne t’emballe pas, mon vieux. Tu ne vas pas, j’espère, poser au censeur, au donneur de sages avis, au tuteur ? Si tu