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ÉTIENNE DOLET

leurs lettres relèvent considérablement Dolet à nos yeux. Toutefois il eut un troisième correspondant, dont les témoignages jettent une lumière très vive sur la période qui nous occupe en ce moment.

Parmi les contemporains de Dolet qui au moment de son arrivée à Toulouse étudiaient le droit à l’Université, nul n’avait eu plus de succès dans les écoles et ne donnait de plus brillantes promesses comme juriste qu’Arnoul Le Ferron. Né en 1515, par conséquent plus jeune que Dolet de cinq ans, il avait presque terminé ses études, lorsque les discours furent prononcés et, bien qu’il n’eût alors que dix-huit ans, il se préparait déjà à faire des cours, vraisemblablement avec l’approbation des autorités. Son père, Jean Le Ferron, originaire d’Italie, s’était fait une réputation d’homme de loi à Vérone ; ce fut le cardinal de Bourbon qui lui fit quitter cette ville et obtint pour lui la situation de conseiller au parlement de Bordeaux[1]. Son jeune fils Arnoul l’accompagna en France (ou naquit peu après son arrivée). En 1536, à l’âge de vingt et un ans, Arnoul fut nommé conseiller du parlement de Bordeaux en remplacement de son père, par l’entremise du cardinal Du Prat. L’âge requis pour occuper ce poste était vingt-cinq ans, mais il avait déjà donné tant de preuves de capacité que ses futurs collègues, le président et les conseillers du parlement, se portèrent garants auprès du cardinal de ses aptitudes à remplir sa charge ; on passa outre et on lui accorda des lettres de dispense[2]. L’attente de ses collègues fut amplement justifiée. Pour son début il se signala par son grand ouvrage sur les coutumes de Bordeaux, qui immédiatement lui acquit une haute réputation, et continua

  1. Boscheron des Portes : Hist. du Parlement de Bordeaux (Bordeaux, 1878). vol. I, 117. Suivant cet historien, Arnoul était né à Vérone, mais, d’après d’autres autorités, il serait né à Bordeaux.
  2. Le même fait se reproduisit quelques années plus tard en faveur d’un homme encore plus distingué. Lorsque Etienne de la Boétie fut nommé conseiller du Parlement de Bordeaux en 1553, on dut également lui accorder une dispense d’âge (il avait vingt-trois ans). Id. I, 119.