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ÉTIENNE DOLET

souffrant d’un mal si grave qu’on désespère de lui sauver la vie ; la fortune, qui a été plus que prodigue envers lui d’honneurs et de richesses, l’accable maintenant d’une maladie mortelle. C’est ainsi que la cruelle déesse se joue de nous, elle ne nous permet pas d’être heureux longtemps et de jouir d’un bonheur complet. Mais j’en ai assez dit, j’oublie à qui je m’adresse, à un sage qui accepte en souriant les nécessités des lois humaines. Oh ! combien je désire qu’à sa mort vous puissiez être son successeur, vous en êtes digne autant à cause de la grandeur de vos vertus qu’à cause du soin que vous avez pris des affaires du roi[1] ! Mais Dieu disposera. En attendant, je fais mille vœux pour vous et je prierai pour votre bonheur. Adieu.

« Toulouse, Ier mars[2]. »

Le désir que Dolet avait de revoir l’Italie ne devait pas se réaliser. Un peu plus de trois semaines après que cette lettre fut écrite, il fut arrêté et jeté en prison par ordre du jugemage Dampmartin, sous l’accusation d’avoir excité à la révolte et d’avoir attaqué le parlement.

« Nullum me scelus in vincula conjici

Poscebat, neque per compita turpiter

Duci. »

C’est ainsi qu’il commence l’ode pleine d’amertume qu’il imprima ensuite pour se venger de Dampmartin[3]. Ce fut à lui que Dolet fut redevable du premier de ses nombreux empri-

    Henri VIII. Il avait été nommé à l’archevêché de Toulouse cinq mois seulement avant la date de cette lettre, à la mort de Jean d’Orléans, cardinal de Longueville (octobre 1533). Il occupa le siège épiscopal de Toulouse pendant moins de six mois et mourut le 26 mars 1534.

  1. Le vœu de Dolet ne fut pas accompli. À la mort de Gabriel de Gramont, Odet de Coligny, qui n’avait que dix-huit ans, mais qui était déjà cardinal, fut nommé à l’archevêché de Toulouse.
  2. Orat. duœ in Tholosam, p. 137.
  3. Ibid., p. 200.