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CHAP. VIII. — GUILLAUME BUDÉ ET JACQUES BORDING

haute réputation, j’ai résolu de me consacrer à l’étude du droit, ce que je ne crois pas être incompatible avec mes autres travaux. Car il est certain que mon talent oratoire peut être singulièrement rehaussé par la connaissance du droit et même y trouver un appui sérieux. Afin de poursuivre ces études de la meilleure manière possible et d’écouter les conseils de ceux qui disent qu’aucun art ne peut s’apprendre convenablement sans maître et sans quelque instruction pratique, je suis venu à Toulouse, ville plus célèbre et plus renommée pour les études de droit que réellement savante à cet égard ; ses habitants sont plus barbares que les Gètes des Scytes. Mais quoi qu’il en soit, la grossièreté de cette ville barbare n’a nullement arrêté mon dessein. Je n’ai pas consacré moins de deux années consécutives à l’étude du droit, et je me suis arrangé de manière à pouvoir donner quelques heures le matin et le soir à la lecture de Cicéron. Pendant le reste du jour je m’occupe de mes études principales, soit tout seul, soit en public. Ainsi j’ai écouté mes amis et je ne le regrette pas, car, sans nul doute, la connaissance du droit sera pour moi un grand secours et une recommandation pour trouver un emploi public, puis elle me donnera plus de facilité pour m’exprimer en me faisant mieux discerner le vrai et le juste. Il n’est pas sûr toutefois que j’achève mes études de droit à Toulouse, car j’ai l’intention de partir pour Padoue ou pour Pavie, afin de voir Alciat[1] et les autres professeurs italiens prononcer leurs sesquipedalia verba avec une pompe solennelle ou attaquer furieusement

  1. Alciat jouissait à cette époque d’une réputation plus grande qu’aucun autre de ses contemporains (réputation, suivant moi, tort peu proportionnées à ses mérites réels) comme professeur de droit civil et comme commentateur. Il était à ce moment professeur de jurisprudence à Pavie. Il avait occupé la chaire de droit civil à Bourges de 1528 à la fin de 1532 ; il revint alors en Italie où Franceson Sforza, duc de Milan, le nomma à Pavie avec de appointements de 1000 écus. Il resta à Pavie jusqu’en 1537- Panciroli, qui le connut : nous donne vie lui le portrait suivant : « Vir fuit corpulentes, p auri avidus habitus est et cibi avidior ». De claris legum int II.)