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ÉTIENNE DOLET

lettres de ses amis qui comprend trois épîtres de Le Ferron, deux de Boyssone (sans nom toutefois), une de Jean de Pins à Dolet et une autre du même à Minut au sujet de son ami, cinq de Bording, deux de Breslay et enfin une de Budé.

Les épîtres sont suivies de deux livres de poésies, — j’ai cité les plus importantes. Elles n’ont pas toutes un égal mérite et ne sauraient être placées au premier rang des vers latins de l’époque, toutefois la plupart de ces petites pièces montrent une grande habileté de versification, et quelques-unes, un sentiment et une grâce poétiques très remarquables. Nous savons bien que Jules-César Scaliger, qui, comme tant d’autres, invectiva le malheureux Dolet, le flétrit du nom d’athée et fut assez insensible pour se réjouir de le voir consumé par les flammes, dit que sa poésie était languida, frigida, insulsa, plenissima vecordiœ, et déclare que l’auteur de pareils vers ne mérite pas le nom de poète, mais celui de poeticum excrementum[1]. Mais lorsque nous nous rappelons que Jules-César Scaliger plaçait Homère bien au-dessous de Virgile et que Huet dit fort justement de ses poésies qu’elles sont brutes et informes et qu’elles ont déshonoré le Parnasse, nous ne nous en tiendrons pas volontiers à son opinion sur un homme qu’il haïssait d’une haine si violente et si implacable.

À la dernière page du livre apparaît pour la première fois la devise que Dolet emprunta aux épîtres de Cicéron son maître ; devenu imprimeur, il plaça à la fin de tous les livres latins et de plusieurs livres français qu’il imprima cette sentence qui peut si bien s’appliquer à sa vie : Durier est spectatœ virtutis quam incognitœ conditio.

Après sa convalescence Dolet passa environ six semaines

    également sa place ici : « La gloire d’écrire en latin correct, et le plaisir de lire cette prose sont achetés fort cher lorsque ces lettres sont aussi vides de sens que les épîtres châtiées de Paul Manuce et des écrivains de l’école cicéronienne d’Italie. »

  1. J. C. Scaliger : Poétique, Lib. VI.