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Page:Christie - Étienne Dolet, trad. Stryienski, 1886.djvu/35

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CHAP. I. — ORLÉANS ET PARIS

mais nous pouvons toutefois faire bon marché de l’histoire absurde qu’Amelot de la Houssaye[1] a le premier racontée dans un livre imprimé. « On disoit en ce temps-là », écrit-il, « et je connois des gens qui le disent encore, qu’il étoit le fils naturel du roi François I er et d’une orléanoise nommée Cureau, et qu’il ne fut point reconnu à cause du commerce que l’on dit au roi que cette demoiselle avait eu avec un seigneur de la cour. » Or, en 1509, François, alors duc de Valois[2], n’avait pas encore tout à fait quinze ans. Mais tout en rejetant cette fable, nous ne pouvons pas accepter aveuglément ce que Dolet nous dit sur sa famille. Voici ce qu’on lit dans sa seconde lettre à Budé : « Je naquis à Orléans, quelle situation honorable et même distinguée je devais avoir parmi mes concitoyens ce n’est pas à moi de le dire, je laisse ce soin à ceux qui mettent la naissance au-dessus de la vertu. » Et dans son second discours en réponse à Pinache, qui lui avait reproché l’obscurité de sa famille et la bassesse de sa naissance, on lit : « Je suis né de parents qui n’avaient nullement une position basse ou inférieure, ils occupaient dans le monde un rang honorable et même distingué ; la fortune de ma famille n’était pas médiocre, et si mes parents ne pouvaient parler ni de leurs ancêtres, ni de leur noblesse, ni de leur dignité élevée, ni d’aucun de ces avantages qui sont plutôt dus au hasard et dont on n’a pas le droit de se glorifier, ils n’en jouirent pas moins d’une prospérité ininterrompue et passèrent toute leur vie heureux et à l’abri du blâme. Il se peut qu’ils n’aient jamais atteint un rang très élevé et qu’ils ne se soient fait remarquer en aucune façon, mais ils vécurent comme des citoyens respectés au milieu de leurs pairs, et les honneurs civiques ne leur manquèrent pas. »

  1. Mémoires historiques, politiques et littéraires, vol. II. p. 33. Voyez aussi Patiniana, p. 37.
  2. Bayle, Maittaire et Boulmier traitent cette fable comme elle le mérite. M. Boulmier (p. 6) dit : « L’histoire s’est déjà montrée assez libérale envers François Ier quand elle a cru devoir le gratifier du surnom de Père des lettres : il est inutile d’en taire encore le père des littorateurs. »