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Page:Christie - Étienne Dolet, trad. Stryienski, 1886.djvu/401

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CHAP. XX. — PRÉSAGES DE LA FIN

les preuves ne manquaient pas pour montrer qu’il se ralliait aux idées de progrès et de liberté intellectuelle, qu’il aimait d’affection tous les hommes de ce parti, et qu’il n’avait que de la haine pour leurs adversaires, lesquels étaient aussi les siens.

Mais tout en s’inquiétant peu de savoir qui il offensait par ses paroles et par ses actions, il n’était pas, paraît-il, indifférent au préjudice que lui causaient ces accusations d’hérésie et d’athéisme, et les premières publications sorties de ses presses tendaient surtout à atténuer ces fâcheuses rumeurs. Dans le Cato Christiamus, dans le Genethliacum et dans l’Avant-Naissance il s’exprime en des termes qui auraient dû éloigner les accusations d’irréligion et encore plus les accusations d’athéisme . Mais ces déclarations ne satisfirent pas ses ennemis. Bien qu’incompatibles avec l’athéisme, ces livres pouvaient émaner d’un hérétique, et faire accuser d’hérésie celui qui en était l’auteur. De plus, dans ses épigrammes il se moquait de la cagoule des moines, dans ses Commentaires il attaquait violemment la Sorbonne, parce qu’elle avait essayé de supprimer la typographie, et, dans ses lettres, il avait parlé de l’ami de cœur, du fidèle conseiller du premier président du parlement de Paris en l’appelant «cette brute de Béda». Mais ses ennemis le jugèrent d’après sa vie et d’après son langage, non pas seulement d’après ses publications. «L’opinion que chacun a de votre impiété», dit Floridus Sabinus[1]«ne peut être déracinée par tous les Genethliacum du monde.» Sa vie n’était pas ce que la vie d’un chrétien doit être. Il était bon citoyen, bon mari, bon père de famille, mais cela importait peu. II se promenait aux heures des messes. Il préferait le sermon à l’office lui-même. On disait même tout bas qu’il mangeait de la viande en carême[2]. On le soupçonnait avant qu’il eût installé ses presses, et les deux premiers livres imprimés par lui (sur

  1. Adv. Calummas S. Doleti.
  2. Procès, p. 11.