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CHAPITRE X.

peaux desployez, Tambours battans, la mesche allumée, sans qu’aucun des soldats et autres gens de guerre qui auront esté soubs sa charge puissent estre arrestez en quelque façon que ce soit, présentement, ny recherchez à l’advenir pour faict de guerre, et pourront les chefs avoir deux charrettes pour emporter les commoditez à eux appartenants et non à autres.

Pour le respect de l’artillerie, celle du Roy ayant tiré, elle est à celuy qui commande à l’artillerie de Sa Majesté.

Monseigneur le Mareschal fera conduire le capitaine Jacques et ses compagnons en lieu de seureté, par personnes notables.

Que si aucuns soldats de la compagnie du capitaine Jacques, tant de cheval que de pied, habitans de ceste ville de Dourdan, le veulent suivre, ne leur sera fait aucun desplaisir.

Pour le respect du receveur des tailles, sera suivy l’ordonnance que le Roy a faite sur ce, le Roy ne perd point ses tailles.

Les habitans de ceste ville de Dourdan pourront retourner en leurs maisons et biens, en faisant les submissions et serment de fidélité portez par les ordonnances du Roy, et seront traitez comme subjects de Sa Majesté, et jouiront doresnavant de leurs biens.

Pour les droicts et revenus de Madame de Nemours, sera renvoyé au Roy, qui y fera tousiours ce qu’il luy semblera estre à faire pour sa bonne parente.

Le capitaine Jacques sortira du chasteau de Dourdan avec les gens de guerre qui y sont, et remettra la place en l’obéissance du Roy lundi prochain au matin. Cependant il ne fera travailler en aucune façon aux fortifications de ladite place, et pour seureté de cela baillera hostages à Monseigneur le Mareschal.

Faict au Camp de Dourdan, le vendredy 17 de may 1591. Ainsi signé, BIRON. Et plus bas : Par Monseigneur le Mareschal, Julien. Et scellé du cachet dudit sieur[1]. »

En vertu de ce traité, le lundi 20 mai, au matin, le capitaine Jacques sortit fièrement du château, avec tous les honneurs de la guerre, à la tête des bataillons décimés de sa garnison. Escorté jusqu’à une certaine distance par de nobles officiers de l’armée royale[2] et des gentilshommes royalistes du pays, il reprit ses ôtages, et, se repliant en bon ordre vers Paris, alla mettre son épée et celle de ses braves gens au service des chefs de la Ligue, toujours maîtres de la capitale. Nos lecteurs nous permettront de suivre un instant à Paris la garnison de Dourdan, pour voir de près comment on l’y reçut.

Paris, encore une fois affamé, apprit, le lundi 20 mai, la prise de Dourdan par le roi et s’en émut, au dire des historiens du temps. Les chefs savaient gré au capitaine Jacques de sa belle défense, mais le peuple, que l’inquiétude et la faim rendaient injuste, se croyait trahi. Voici une

  1. On voit, d’après les dates, que de Lescornay a singulièrement exagéré la longueur du siége, quand il la porte à six semaines. L’histoire nous apprend que Henri IV quitta Chartres le lundi 22 avril, et que le maréchal de Biron y resta au moins jusqu’au 24, pour asseoir la taille sur les habitants et désarmer la milice. Il ne dut être devant Dourdan que le 26. Du 26 avril au 17 mai, il put y avoir 21 jours de siége. C’est déjà, de la part d’une ville comme Dourdan, en face d’un pareil ennemi, une résistance qui peut passer pour héroïque.
  2. Entre autres, M. de Sainte-Colombe, maréchal des logis de la compagnie de M. de Châtillon.