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LES ORIGINES DE DOURDAN.

Parmi ces débris, il se trouve plusieurs spécimens des belles poteries rouges brillantes dites samiennes, entre autres deux écuelles ou soucoupes profondes à mascarons représentant des têtes de lion, à fond rugueux et siliceux, destinées au broiement de quelque ingrédient culinaire ou pharmaceutique ; — des fragments portant des moulures ornées d’arabesques et une portion de médaillon à personnages ; — un éclat de poterie intérieurement rouge, et glacée par la cuisson d’une belle couleur ardoisée et métallique ; — une petite tête d’enfant en terre grise, fruste mais expressive, destinée à être appliquée comme mascaron, etc.

A côté de ces restes de poteries élégantes existent un grand nombre de débris de poteries communes de toutes les formes, grises, noires, blanches, à tous les degrés de cuisson, pots renflés, cruches ou bouteilles à une ou deux anses, écuelles ou sébiles, goulots de toutes sortes, bords, fonds ou pieds d’espèces de marmites d’un grand diamètre, etc. ; mais nous avons vainement cherché quelques marques de potier, quelques vestiges de moule. Parmi ces fragments on a trouvé deux moyens bronzes romains, d’une très-belle conservation, l’un de Néron et Drusus, l’autre de Trajan, qui témoignent des premières années de notre ère. Les monnaies romaines sont d’ailleurs assez fréquentes dans le sol de la ville ; une sorte de cachette dans une maison de la rue Saint-Pierre a fourni jadis un grand nombre de pièces malheureusement dispersées. Parmi celles qu’on a recueillies, ou dont on se souvient, quelques-unes portaient l’effigie de César et d’Auguste, la plupart appartenaient aux Antonins, et les autres dataient de leurs successeurs ou du bas empire. Les tuiles à rebords ne sont pas rares non plus, principalement dans un chantier au nord-est de la ville[1].

La présence des Romains à Dourdan n’a rien qui doive nous surprendre. Admirables stratégistes, ils ne manquaient jamais d’utiliser pour la défense du territoire qu’ils avaient conquis les points déjà fortifiés et reconnus les meilleurs par les indigènes eux-mêmes. Ils transformaient

  1. Au moment où nous mettons sous presse, des trouvailles intéressantes viennent d’être faites dans cette région, à l’occasion des fouilles opérées pour les constructions de M. Beaurienne et de M. Gingréau. L’emplacement d’un cimetière gallo-romain a pu être facilement constaté. Douze squelettes au moins, les pieds tournés vers l’orient, ont été trouvés à une faible profondeur. Quelques-uns avaient la tête placée entre deux grosses pierres. Des clous permettent de penser que plusieurs avaient été déposés dans des cercueils. Des débris de poterie étaient mêlés aux terres. Un caveau, à demi effondré, contenait les ossements d’un personnage dont la tombe avait été brisée. Un fragment de moulure ou corniche, des débris d’animaux, le crâne d’un bœuf, de magnifiques tuiles à rebords, une meule à bras, des tessons de poteries, un vase intact en terre rouge fine élégant de forme et décoré d’entailles, le fond d’un autre vase contenant un dépôt vitreux de plusieurs centimètres d’épaisseur, une sorte de chaton en verre, quelques petits bronzes du bas empire, sont les objets les plus intéressants que la fouille de ce caveau ait amenés au jour. Ils donnent la date du quatrième siècle environ de notre ère, et les terres profondément remaniées, les détritus, les pierres enfouies dans le sol attestent un long et ancien établissement.