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CHAPITRE XXI.

En règle avec ses voisins, Regnard s’occupa de conduire gaiement sa vie. Il avait quarante-quatre ans, plus de fortune que n’en ont d’ordinaire les poëtes, une philosophie de cynique mitigé qui lui permettait d’aimer à la fois le plaisir, l’étude, les copieux soupers, les délicats festins de l’esprit, les gaillards compagnons et la bonne société. Grillon devint, en peu de temps, le rendez-vous de la jeunesse spirituelle et élégante des environs. M. de Lamoignon y venait familièrement et amenait avec lui la foule toujours renouvelée des aimables et nobles invités de Bâville. Regnard avait plus d’un agrément à offrir à ses hôtes : comme lieutenant des eaux et forêts, il était le maître et le guide des belles chasses des environs. Le marquis d’Effiat, gouverneur de la ville et château de Dourdan, séjournait quelquefois jusqu’à quinze jours de suite à Grillon pour courre le cerf. En passant le soir sur le chemin de Sainte-Mesme on pouvait entendre, derrière les murs des communs, les aboiements des meutes se mêler aux joyeux rires et aux accords des violons. Car on faisait de la musique chez le poëte, et de la musique exquise. Deux demoiselles de ses amies, des plus belles, dit un contemporain, et des plus spirituelles, « qui ont fait longtemps l’ornement des spectacles et des promenades de Paris, » Mlles Loyson, musiciennes excellentes, passaient là les beaux jours et faisaient les honneurs du lieu. Regnard a peint la vie de Grillon dans Le Mariage de la Folie, où, sous le nom de Clitandre, il reçoit les compliments de son ami Éraste :

De tous les environs la brillante jeunesse
A te faire la cour donne tous ses loisirs :
Tu la reçois avec noblesse,
Grand’chère, vins délicieux,
Belle maison, liberté tout entière,
Bals, concerts, enfin tout ce qui peut satisfaire

    demeurant à Paris, proche et hors la porte de Richelieu, estant de présent en son chasteau de Grillon, paroisse de S. Germain de Dourdan, lequel a reconnu et confessé estre tenant, détempteur, propriétaire et pocesseur d’un demy quartier de pré scize proche le moullin de Grillon, tenant des deux costez et des deux bouts à luy à cause dudict moullin de Grillon, comme ayant acquis ledict moullin avec le chasteau dudict lieu et deppendances, de damoiselle Marguerite de Bonnière, veuve de deffunt messire Estienne Lelarge de Rays, vivant conseiller du roy et de S. A. R., maistre des requestes du conseil de sadicte Altesse royalle, et sçayt de vray que l’œuvre de la fabrique de S. Germain dudict Dourdan a droict de prendre et percevoir, par chacun an, le jour de S. Remy, 9 sols parisis de rente fontière, qui font unze sols 3 deniers, au moyen du bail et adjudication dudict demy quartier de pré qui a esté faict en ce bailliage par les marguilliers de ladicte fabrique, en présence et du consentement des maire et échevins de la ville de Dourdan, et de M. le procureur du roy audict bailliage, à messire Guillaume Dugué, cy-devant propriétaire dudict moullin de Grillon, en date du 8 may 1565. Il s’oblige à payer la rente, dont la première année écherra la S. Rémy prochain 1700. — Faict au chasteau de Grillon, après midi, le 6 juillet 1700, en présence de maistre Denis Mallard, pratitien, et Fr. Roger, tailleur d’habits, demeurant à Dourdan, et ont signé avec eux Regnard et Rousseau, notaire. »