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CHAPITRE VII.

jouit largement de sa souveraine faveur et de son riche domaine, mais à la mort de son royal protecteur elle perdit tout (1547). La France oublia la favorite, et Henri II reprit le duché.

Les comptes de l’ordinaire de Dourdan, rendus, pour les années 1540 à 1549, par Louis Tirard[1], receveur ordinaire, nous apprennent que pendant ce temps le roi, comme naguère le seigneur de Gobaches, se réservait toujours, dans la terre des Murs, près le grand étang, affermée aux descendants de Jean Seigneur Charron, le buisson ou tallopée planté d’épines pour l’ébat et la nourriture des conils du roy notre sire. Peut-être le galant roi vint-il chasser à Dourdan, sur les terres de la belle Anne, lorsque, le 26 février 1547, il demeura à Rochefort, un mois avant d’aller mourir au château de Rambouillet[2].

Henri II fit ce qu’avaient fait beaucoup de ses prédécesseurs ; manquant d’argent, il engagea une partie de son domaine. Ce n’était pas la première fois que Dourdan sortait de cette manière des mains du roi de France. Les besoins étaient pressants ; Henri voulait retirer des mains des Anglais les places qu’ils occupaient encore dans le Nord ; il avait à entretenir une foule de gens de guerre dont les exigences embarrassaient singulièrement le trésor. C’est sur ces entrefaites que Dourdan fut vendu, en 1549, à faculté de rachat perpétuel, à François de Lorraine, duc de Guise, en même temps que les seigneuries de Provins et de Saumur, par les commissaires du roi, « avec les aydes qui en dépendent, » pour la somme de « sept vingt quinze mil quatre cens quatre vingt unze livres ung solz tournois. » En reconnaissance des services du duc, très-vantés par le roi, « et pour le désir, ajoute le monarque, que nous auons d’auantager notre dit cousin des prérogatives et prééminences qui puissent tourner à l’ornement et décoration des choses ainsi par lui acquises, lui avons octroyé par ces présentes… pouuoir, puissance et faculté de nous nommer et présenter gens idoynes, capables et suffisans aux bénéfices desdites châtellenies, ressorts et juridictions d’icelles… ensemble à tous et chascuns les états et offices royaulx ordinaires, et davantage aux extraordinaires, des aydes et choses extraordinaires dont il joyt, etc.[3]. »

François de Lorraine ayant, « par inadvertance, » négligé de faire publier et enregistrer ces dites lettres, et craignant quelque opposition, en

    de Parlement : voulant que tous les vassaux et autres gens, de quelque autorité et condition qu’ils soient, tenans noblement ou roturièrement desdits comté d’Estampes et chastellenies de Dourdan et la Ferté quand ils feront doresnavant leurs hommages et bailleront leurs denombremens et adveus, les fassent et baillent sous le nom et tiltre de duché, et semblablement tous leurs autres actes et reconnoissances. » (Lettres-patentes d’érection, janvier 1536. — Archives de l’Empire. X1a 8613, fo 9.)

  1. Une rue de Dourdan (de la rue de Chartres à la rue Neuve) porte encore aujourd’hui le nom de Tirard.
  2. Itinéraire des rois de France. — Pièces fugitives, etc.
  3. Lettres patentes du 8 avril 1550. — Archives de l’Empire, X1a. 8621, fo 184.