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CHAPITRE IX.

pieuse femme, comme au temps des premiers siècles de l’Église, prit soin de les recueillir, les emporta dans sa maison et, paraît-il, s’en servit plusieurs fois pour obtenir à de pauvres malades soulagement et guérison, jusqu’au jour où l’autorité ecclésiastique, comme nous le verrons par la suite, revendiqua et réintégra à Saint-Germain les ossements du martyr. Une tradition qui s’est perpétuée à travers le dix-septième siècle et le dix-huitième (lequel n’est pas précisément le siècle des légendes), attribue aux fossés du château où furent jetées les reliques un singulier privilége, quand on songe à la profondeur de ces fossés : tous ceux qui y tombent par accident sont préservés dans leur chute de mort et de blessure. Nous avons sous les yeux des attestations écrites de nos pères, et bien des personnes de la ville en connaissent et en citent volontiers des exemples.

Dourdan perdit, dans le sac de son château, de ses églises, de ses établissements publics, de son couvent de Louye, toutes les archives de son histoire et tous les titres de son passé ; perte irréparable pour elle, qui a rebuté tous les narrateurs et qui rend si difficile aujourd’hui à son modeste chroniqueur la tâche qu’il s’est imposée !

Les religionnaires laissèrent à Dourdan, en garnison, une partie de leurs troupes[1], mais l’occupation dura peu ; l’armée du roi, commandée par le connétable de France, après la brillante victoire de Saint-Denis (nov. 1567), balaya les environs de la capitale et vint, à son tour, mettre garnison et faire des travaux de défense dans la ville, prise et reprise quatre fois en cinq ans par les deux partis rivaux.

Grâce à une courte trêve entre les adversaires, puis à l’éloignement du théâtre de la guerre, Dourdan put avoir quelques années de tranquillité relative avant ses nouveaux malheurs.

Pendant ce temps, la Dame de Dourdan était toujours la veuve de François de Lorraine, duc de Guise, Anne d’Este, remariée depuis 1566 à Jacques de Savoie, duc de Genevois, et de Nemours. Pour bailli et pour gouverneur, Dourdan avait le brave général de 1567, M. de Bonnelle. Nous avons trouvé une lettre fort amicale que lui adressait Anne d’Este, le 6 mars 1570, pour affaire d’administration : « Je veux vous avertir, lui dit-elle, que j’ai permis à Jehan de Lescornay, officier de la reine-mère, de faire paistre quatre vaches dans la forest de Dourdan, aux allées des gardes de ladite forest, pour le désir que j’ai de luy faire plaisir en aultre plus grande chose que cela, et je vous prie de tenir la main que, sous ombre de cette permission, il ne soit fait par d’aultres aucuns dégâts en icelle forest, laquelle je vous recommande ; et pour l’assurance que j’ai que nos affaires vous sont en si bonne souvenance, il me semble n’êstre besoing de vous en faire plus ample persuasion. Votre meilleure amie, Anne d’Este[2]. »

  1. P. Bas. Fleureau, p. 240.
  2. Nous avons vu aussi un certificat de cette permission du 13 février 1573. Ces pièces font aujourd’hui partie du fonds Roger.