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CHRONIQUE

par un chemin impraticable, auprès de la passe d’Ecluse, et conduisit son armée jusqu’à Gironne, ville très-forlifiée. Ce que voyant les Aragonais qui se tenaient en armes au sommet de la passe d’Ecluse, qui était l’entrée de leur pays la plus fortifiée, et ne croyaient pas que le roi des Français passât par un autre endroit, ils furent grandement saisis d’admiration et d’épouvante, et se réfugièrent dans les villes et les châteaux. Le roi de France assiégeant Gironne, livra plusieurs assauts qui affaiblirent beaucoup les habitans mais ceux-ci, faisant une vigoureuse résistance, tinrent pendant environ trois mois. Vers la fin du siège, à savoir le jour de l’Assomption de la Vierge sainte Marie, mère du Seigneur, le roi de France ayant envoyé vers le port de Roses, où était stationnée la flotte royale, pour apporter à l’armée les vivres qu’on y conservait, Pierre, roi d’Aragon, qui en fut informé, s’empara du chemin avec cinq cents cavaliers armés et trois mille hommes de pied, afin de pouvoir, au retour des Français, piller les vivres qu’ils amèneraient. Mais Raoul, seigneur de Nesle, connétable de France, le comte de la Marche, et Jean de Harcourt, maréchal, instruits de ces embûches, prirent sur-le-champ avec eux cent cinquante-six chevaliers armés, et marchèrent promptement à sa rencontre. A la vue des ennemis venant en si petit nombre en comparaison du leur, les Aragonais, qui ne connaissaient pas la bravoure des Français, les attaquèrent aussitôt. Mais les Français, résistant vigoureusement, tuèrent presque tous les Aragonais, et forcèrent leur roi, qui combattait avec eux, caché sous une armure ordinaire, de s’enfuir du champ de bataille. Mortellement blessé,